Ben Silas, artiste à plein temps

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Auteur, compositeur, producteur, interprète, Ben Silas sait tout faire. En témoigne la conception et la sortie de son second album, Mon Identité (disponible depuis décembre 2010), sur son propre label, Silas Record.

Travailleur acharné qui aime aller au bout des choses, Ben Silas s’est confié au micro de Soulrnb.com. De son regard sur la scène Soul/R&B française à l’ambition et la persévérance dont il fait preuve dans chacun des projets qu’il entreprend, entretien avec un artiste complet, passionné et bourré au son, représentant d’une scène encore trop absente des médias.

 

Salut Ben ! Comment ça va ? Salut ! Bah écoute ça va bien, un peu fatigué car je sors du sport (rires).

Avant de parler de ton nouvel album, peux tu nous retracer ton parcours ? Tout a commencé il y a bien douze ans. Je faisais partie d’un groupe de gospel, Spiritual Love. On était 4 et on se produisait dans les églises, les mariages et les universités. Par la suite, je me suis dirigé vers une carrière solo parce que j’aspirais à quelque chose de plus soul, R&B, et hip-hop, des univers qui me ressemblent vraiment. J’ai donc commencé la composition et l’écriture, c’était il y a neuf ans, environ. J’ai fait beaucoup beaucoup de titres et, à un moment, je me suis dit qu’il fallait que j’aille au bout d’un projet donc j’ai sorti mon premier album, “Ce Que Je Ressens”, en Mai 2005. Album de 12 titres qui retrace ce que j’avais fait les 5 années précédentes. Ensuite, j’ai fait pas mal de choses à droite : chœurs, coaching vocal. Puis, j’ai voulu rassembler différents artistes, donc j’ai lancé en février dernier, “Ne Baisse Pas Les Bras”, avec Nespunta, Alibi Montana, Dany Dan, etc. Pour finalement revenir en solo, cinq ans après. Je voulais cette deuxième galette, et je l’ai sortie le 13 Décembre 2010.

Pourquoi avoir attendu cinq ans ? Après le premier album, qui n’a pas forcément super bien marché, je me suis mis en retrait, j’ai voulu prendre du recul et me remettre en question. J’ai aussi avancé sur le plan professionnel, parce qu’il faut savoir que ce n’est pas mon métier, je voulais arriver à un certain statut et atteindre un niveau dans mon métier initial qui me permette de vivre convenablement. Puis finalement je suis retombé dedans (rires). Je suis vraiment un passionné de son, un passionné de musique, et ça me manquait trop, je me suis dit “il faut vraiment que je ressorte quelque chose parce que j’en ai besoin”. Donc j’ai recommencé à bosser, à faire des instrus, à écrire. Je suis retourné en studio. Entre le moment où j’ai sorti “Ce Que Je Ressens” et le moment où j’ai commencé à travailler le deuxième album, il s’est bien passé trois ans.

Ton nouvel album s’intitule “Mon Identité”, qu’a-t-il de différent avec ton premier solo ? Il y a plus de maturité au niveau de l’écriture, au niveau des sons, qui sont beaucoup plus travaillés. L’album est différent aussi parce que j’ai essayé d’élargir mes horizons au hip-hop et à la pop tandis que le premier LP était bien plus R&B/Soul. Le nouvel album reflète bien qui je suis, dans la mesure où j’écoute vraiment de tout. Alors effectivement, j’écoute surtout du R&B, de la soul, mais j’aime aussi la belle pop américaine ou anglaise, le jazz. Je suis un fondu de hip-hop mais j’écoute du classique également. Le classique est une vraie source d’inspiration pour les artistes qui composent, qui produisent. Donc voilà, “Mon Identité” est différent parce que cinq ans de plus, parce que plus de maturité, parce que plus de travail.

Tu es auteur-compositeur-interprète, as-tu écrit tous les titres de ce nouvel opus ? Qu’as-tu fait d’autre ?Oui j’ai tout écrit, hormis les featurings, où ce sont les artistes eux mêmes qui ont écrit les parties où ils interviennent. Sinon, j’ai tout fait, de A à Z, textes, production, etc. Je suis un beatmaker donc quand j’ai besoin que cela sonne acoustique, j’appelle des musiciens et je leur demande de reproduire exactement les lignes que j’ai faites sur ordinateur.

Quand on se penche sur les titres de tes deux albums (“Ce Que Je Ressens”, “Mon Identité”), on remarque leur dimension très personnelle, qu’en est-il des chansons les composant ? Le contenu de “Ce Que Je Ressens” était beaucoup plus autobiographique que le contenu de “Mon Identité”, qui est un album aux textes plus fictifs, très inspirés de ce qu’a pu me raconter mon entourage, des échanges que j’ai eu avec des personnes rencontrées, je me suis inspiré de ces différentes histoires pour écrire mes textes. Donc dans l’ensemble, “Mon Identité” est moins autobiographique, à part deux-trois titres, notamment “Merci”, dans lequel je parle de ma mère.

Et justement, de quoi parle “Mon Identité” ? Mmh, des thèmes R&B si je puis dire (rires), l’amour, on ne peut pas y échapper (rires) ! J’analyse notamment la relation homme/femme sur le titre “Vénus et Mars”, j’essaie d’y rééquilibrer un peu les choses. Sinon, j’ai voulu aborder le thème des questions existentielles, tu sais le genre “Qu’est ce que j’aurais pu être si je n’avais pas été la personne que je suis aujourd’hui ?” Dans le titre “Lueur d’Espoir”, je parle des points négatifs de ce monde et de comment les choses pourraient être différentes si nous avions plus de lucidité et d’espoir. J’y parle des guerres et de tous ceux qui les subissent.

Tu as clippé le single “La Seule”, il y a quelques mois, un autre single est il prévu ?Je vais lancer le titre “Merci” d’ici quelques semaines parce que c’est un morceau qui me parle et qui plait. Maintenant, je ne sais pas si les médias vont jouer le jeu, c’est très difficile, en tant qu’indépendant, de booster un single, je l’ai déjà vécu avec “La Seule”. On a passé du temps sur ce tournage, on a essayé de faire un beau clip, mais il ne passe pas aux heures que l’on aurait souhaité, il est rentré difficilement en télé, donc on va voir ce que donne le titre “Merci”. Je vais le proposer aux radios, je vais le diffuser sur Internet à partir de fin février/début mars, et si ça prend bien, on fera un clip.

Tu nous parlais des différents styles musicaux que tu écoutes, tout à l’heure, si tu devais nous citer les artistes qui t’inspirent ? Et bien, sans surprise, les grands noms de la soul : Marvin Gaye, Otis Redding, Donny Hathaway, Aretha, etc. Et à côté, de nombreux artistes de R&B plus contemporain m’inspirent, notamment Brian McKnight, qui est pour moi Monsieur…

… (Rires) tu étais à son concert en Décembre ? Pas le dernier non, mais je suis allé aux trois précédents (rires) ! Et pour tout te dire, à chaque fois, c’est une claque même s’il reprend à chaque fois les mêmes sons sur scène. C’est Monsieur McKnight et je suis un grand fan. Et sinon, parmi les autres artistes qui me parlent : Jaheim, Carl Thomas, Donell Jones, Keith Sweat et R. Kelly sont vraiment dans mon top 10 ! J’avais un faible pour Lyfe Jennings mais je n’ai pas autant accroché à ses deux derniers albums, alors que premier est vraiment top. J’aime aussi beaucoup le Musiq Soulchild des débuts, qui est lui aussi parti dans une autre direction. J’ai l’impression que, depuis quelques temps, tous les artistes essaient de toucher à quelque chose d’autre, alors que ça ne leur va pas forcément, c’est dommage…

Tu as souvent collaboré avec des rappeurs français : à tes débuts, tu as travaillé avec le groupe Gentlemen, dernièrement, tu as sorti “Ne Baisse Pas les Bras”, avec Sat, Dany Dan (qui posait déjà sur ton premier disque), etc. Penses-tu que le R&B a besoin du rap pour exister en France ? Pas forcément. Les deux peuvent exister à part entière. Personnellement, si j’ai fait toutes ces collaborations, c’est parce que j’aime beaucoup le hip-hop et quand un son me parle, j’y vais. Maintenant, je pense que la scène Soul/R&B n’a pas besoin de rappeurs pour exister comme on a pu le penser à une époque. C’est vrai qu’avant, quand tu arrivais en maison de disques et que tu présentais ton projet, on te disait “Vas-y, essaie de faire un featuring avec un rappeur, ça va te booster.” Il y a eu des associations dans le passé où l’alchimie était flagrante, mais aujourd’hui, c’est tout de même plus rare. Personnellement, ça fait un moment que je ne me suis pas posé sur une collaboration de ce type en me disant “Wow, ça fonctionne, ça sonne bien.”

Que penses-tu de la place accordée à la scène R&B française, aujourd’hui ? Et bien… Il n’y en n’a pas. Malheureusement on n’a pas du tout de place dans les médias, on a aucune visibilité, que ce soit en télé ou en radio. On rentre presque dans une espèce de cercle car quand tu proposes un clip aux télés, on te répond “Le clip sera joué si tu passes en radio” et quand tu vas en radio : “Ton single sera diffusé seulement si ton clip passe en télé”. Ici, les médias ne sont vraiment pas friands de R&B/Soul à la française. Je crois que le problème vient du fait qu’il n’y a pas assez d’artistes allant au bout d’un projet, il n’y a pas assez d’offre. La demande est là, j’en suis sur. Tu le vois surtout à Paris, parce qu’il y a un vrai public. Mais même en Province ! J’ai eu l’occasion de faire des scènes en Province et j’ai vraiment reçu un bel accueil. Le public est très ouvert, chaleureux et en attente de quelque chose.

Donc selon toi, le problème ne viendrait pas du public ? Non, je pense qu’il est plus du côté artistique. Attention, il y a des artistes, il y en a beaucoup. Mais combien vont au bout d’un projet concret ? Ils vont poser sur un ou deux sons et c’est tout. L’espérance de vie du titre et, par conséquent, de la notoriété de l’artiste va donc être de quelques mois seulement, et après on ne va plus en entendre parler…

Mais tu ne penses pas justement que ces artistes ne vont pas plus loin parce qu’ils n’ont pas ce soutien, ni mêmes les moyens de gérer un projet dans sa globalité ? Surement, mais regarde, je fais tout tout seul. Forcément ce n’est pas toujours facile, je me suis beaucoup privé dans ma vie et je me prive encore parce que j’ai une passion, c’est une drogue et je ne peux pas faire sans. Il y a plein de choses que je n’ai pas faites parce que j’ai tout misé sur cette passion. J’ai monté ma boîte, j’ai fait des concessions pour faire ce que j’aime. Si je n’avais pas monté ma boîte, je n’aurais pas pu sortir mon album. Je l’ai proposé aux maisons de disques, elles n’en voulaient pas, donc je l’ai sorti moi-même. Qu’il soit bien accueilli ou pas, tout en sachant que ce ne sera pas le dernier, qu’il y en aura d’autres. Il y a aujourd’hui plusieurs méthodes permettant de sortir des albums avec peu de moyens, il faut en profiter. Il faut croire en son truc et ne pas se dire “Je laisse tomber, ça ne va pas marcher” parce que quand ça marche… C’est top !

Donc pour toi, c’est ce qui manque pour que cette scène bénéficie d’une plus grande visibilité ? Ca… Et la solidarité. Regarde comment ça se passe aux Etats Unis, dès qu’un artiste buzz, il ramène son poulain ou l’artiste dont il a senti le potentiel. Je prends l’exemple des Etats Unis car ça reste une référence dans le domaine musical, il y a une vraie culture du chant. Blues, Soul, R&B, Gospel mais aussi Rock, tous les artistes chantent et souvent, ils s’entraident. Ainsi, de nombreux artistes non signés existent quand même parce qu’ils ont eu ce petit coup de pouce. S’il y avait cette même solidarité en France, les choses seraient différentes. Imagine que les artistes français se disent “Allez venez, on monte un label tous ensemble !” Regarde les tournées américaines, les artistes font beaucoup de plateaux, beaucoup de scènes collectives.

Et tu penses que c’est en train de revenir ?Pas vraiment non, au contraire… Quand tu sors un album, tu vois tout ce qu’il se passe, tu es vraiment aux premières loges, donc pour avoir sorti deux albums en cinq ans, je vois bien qu’entre 2005 et 2010, les choses se sont empirées. Il n’y a plus de vraie scène Soul/R&B. Il y a une belle scène underground, c’est clair, mais c’est tout. Alors qu’à l’époque, il y avait une scène. Rien qu’en 2005, il y avait encore Corneille, LS, Gage, Matt Houston, aujourd’hui… Certes, tu as des artistes signés en maison de disques estampillés “R&B”, mais bon, pour moi, ça n’en est pas. C’est vraiment dommage.

Tu as entièrement conçu tes deux albums, tu as sorti le premier sur un label, Tum’soul music, monté toi-même avec un ami. Aujourd’hui, “Mon Identité” sort via ton label Silas Record. Tu ne penses pas que le soutien d’une major pourrait te permettre de mieux imposer ta signature sur la scène R&B/Soul française ? Si bien sur. D’ailleurs, j’aimerais… Mais bon, ce n’est pas évident. Je pense proposer mon troisième album en maison de disques. Tout est si différent, je le vois encore aujourd’hui et je ne pensais pas que c’était aussi dur. Tout faire seul… C’est beaucoup d’investissement personnel, pour une exposition bien moins importante. Quand tu as une maison de disques derrière toi ça n’a rien avoir. Le regard des gens est aussi très différent. Je crois que si j’avais été signé en maison de disques, mon single “La Seule” aurait bénéficié d’un tout autre accueil en télé et en radios.

As-tu d’autres passions ? Que fais-tu quand tu ne fais pas de musique ? Je fais beaucoup de sport (rires) ! Sinon, j’adore le cinéma et tout ce qui est en rapport avec le septième art d’ailleurs. Je m’y intéresse vraiment et suis très critique.

C’est vrai ? Un acteur et un film fétiches ? Oh j’en ai plein (rires) ! Je voue un culte à Clint Eastwood, autant comme acteur que comme réalisateur. Donc film fétiche… Je dirais “Million Dollar Baby”. Puis sinon, bien sur, Denzel Washington, qui est juste un tueur dans “Training Day” et dans “Malcolm X”. D’ailleurs, j’aime beaucoup Spike Lee. J’accorde beaucoup d’importance à la réalisation, je m’y intéresse puis sinon, quand j’ai vraiment envie de me détendre, je vais voir un navet (rires).

Dernier film que tu as vu ? “Au-Delà”… De Clint Eastwood ! Pas mal du tout.

Quels sont les derniers albums que tu as achetés ? Récemment, je me suis procuré le dernier Jazmine Sullivan, “Love Me Back”, mais seulement 4-5 chansons ont vraiment retenu mon attention. Il faut savoir que quand j’écoute un album, j’ai tendance à le décortiquer, à analyser les productions, à le repasser en boucle pendant des semaines pour percevoir tous les détails. J’ai aussi acheté le dernier Cee-Lo. Ce type a une telle voix ! Dire qu’il y a 15 ans, c’était un rappeur… Qui rappait déjà super bien d’ailleurs. Et sinon, je me suis aussi procuré “Ridin Solo” de Keith Sweat, un peu décevant, et le dernier Faith Evans, que j’ai beaucoup aimé. L’album, les prods, tout est super soigné. Là, je suis impatient de découvrir le nouveau Ginuwine qui s’annonce très bon…

Pour terminer, et puisque ce second album s’intitule “Mon Identité”, j’ai envie de te demander… Qui est Ben Silas ? Ben Silas, fruit d’un métissage afro-antillais, parisien pure souche né à Paris, tenant beaucoup à sa ville et à la culture l’accompagnant (je trouve que Paris pourrait d’ailleurs bien plus relier la musique à sa culture). Je suis juste un drogué de son, qui continuera à en faire quoiqu’il arrive !

Et bien merci beaucoup Ben ! C’est moi, à bientôt !

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